Le rêve d'Alexia - L’Éclat du Loup
Introduction
Dans les rues froides de Lausanne, un souffle de
tension parcourait l’air. La Commissaire Alexia Hoffer avançait à grands
pas, un manteau sombre jeté sur ses épaules et son regard vert perçant, elle
incarnait l’autorité et la résolution.
Ce soir-là, elle revenait sur les lieux du Meurtre de la
Cathédrale. Un symbole mystérieux venait d’apparaître à quelques mètres de
l’ancienne scène du crime : une Fleur de Lys gravée à la lame sur une
stèle oubliée, comme un écho à une vérité encore enfouie.
Alexia s’arrêta. Sa main se posa sur son épaule
droite, là où le loup tatoué semblait frémir sous la tension. Cette
enquête la hantait. Trop parfaite, trop mise en scène. Le genre de crime
qui défie l’expérience, où chaque élément semble à la fois pièce d’un puzzle
et leurre.
Avec son carnet de notes dans une poche, un couteau
suisse dans l’autre, elle entama une inspection minutieuse. Une goutte
de cire noire, presque invisible à l’œil nu, était tombée près de l’inscription.
Elle la grattait délicatement avec une pince quand un message fut murmuré
dans son oreillette.
« Commissaire, vous allez vouloir voir ça… Un symbole
identique vient d’apparaître au musée historique de Lausanne. »
Elle releva les yeux. Une nouvelle ligne
de fuite venait de s’ouvrir. Le Fugitif n’était pas loin. Elle
inspira profondément. L’instinct, ce vieux compagnon, lui
soufflait que cette fois, la vérité était à portée. Mais à
quel prix ? Sa dévotion à la justice était sans faille,
mais chaque vérité arrachée à l’ombre avait son coût. Et
elle était prête à le payer.
Chapitre 1 Signes dans la
pierre
Le vent glacial balayait le parvis de la Cathédrale de
Lausanne. L’obscurité de la nuit hivernale était ponctuée par
les flashs des enquêteurs et le crépitement lointain d’une radio de
police. La Commissaire Alexia Hoffer s’était agenouillée près de la pierre
gravée, les doigts gantés effleurant le dessin de la fleur de lys.
À ses côtés, l’Inspectrice Sarah Da Silva, le regard
vif malgré l’heure tardive, observait les environs.
« Ce n’est pas la première fois que ce symbole refait
surface. On l’a vu à la vieille carrière aussi, souffla Sarah. »
« Je le sais, répondit Alexia. Mais ici, il est
gravé avec une précision... presque cérémonielle. »
Soudain, une silhouette apparut dans la lumière des
projecteurs. Rémy Delorme, Inspecteur Principal de la Brigade
Délinquance Sérielle, s’avança, dossier sous le bras.
« Ça va vous plaire, dit-il en tendant une photographie.
Regardez le mode opératoire dans l’Affaire du Faussaire. Même symbolique, même
mise en scène. »
Alexia observa l’image. Une mise en scène trop
parfaite. Le tueur ou l’auteur du message cherchait à communiquer. Ce n’était
pas un simple crime, c’était un dialogue crypté à travers les
époques.
« On doit vérifier les connexions avec le Collectif du
Fugitif, murmura-t-elle. Il est temps de revoir Valentina Giacometti. »
Chapitre 2 L’Appel de la
Pierre
Le lendemain matin, la lumière hivernale filtrait à
travers les vitraux du Musée Cantonal d’Archéologie. Dans une salle de
restauration baignée d’un calme presque religieux, Valentina Giacometti
observait un fragment de stèle ancienne, les doigts délicatement posés sur des lignes
effacées.
« Il y a quelque chose d’anormal dans cette gravure,
murmura-t-elle. »
Alexia entra, suivie de Sarah. Le visage de Valentina
se durcit légèrement. Elle n’aimait pas les interruptions. Mais en
reconnaissant Alexia, elle se leva avec dignité.
« Commissaire Hoffer. Vous cherchez quelque chose de
précis ou c’est une visite de courtoisie ?»
« Le symbole, Valentina. La Fleur de Lys.
Gravée hier soir sur une pierre près de la Cathédrale. Et... ce
morceau-ci, il en est orné aussi, non ? »
Valentina soupira et alla chercher un dossier. Elle
l’ouvrit sur un croquis signé Elisa Giacometti, sa sœur.
« Ce n’est pas une simple Fleur de Lys. C’est un
glyphe symbolique utilisé dans des rituels ésotériques du XVIIe siècle. Elisa
pense que ces marques ne sont pas seulement artistiques. Elles seraient
alignées avec les cycles lunaires… et certains lieux d’énergie. »
Alexia resta silencieuse. Elle sortit son carnet de
notes, traça une carte rapide de Lausanne et y marqua les lieux où le symbole
était apparu : la Cathédrale, la vieille carrière, le musée...
« On suit une ligne, murmura Sarah. Un axe. »
Valentina hocha la tête.
« Et si vous le voulez, je peux vous faire entrer en
contact avec OKKO. Il a parlé récemment de rumeurs au sujet de
performances rituelles organisées par le Collectif du Fugitif. Et il prétend
qu’un certain Swann utilisait des perles noires pour ces rituels. »
Alexia ferma les yeux une seconde. Un schéma
se dessinait. Le crime n’était peut-être qu’un message.
Mais alors, à qui était-il adressé ? Et surtout... pourquoi maintenant ?
Chapitre 3 Le Cercle du
Fugitif
La nuit était tombée sur la Place de la Riponne. Dans
un ancien entrepôt réaffecté en salle de spectacle alternatif, des projecteurs
colorés balayaient les murs couverts de graffitis. L’intérieur vibrait
d’une énergie étrange : musique, encens, et voix chuchotante
composaient une atmosphère d’initiation.
OKKO, le musicien du Collectif, était là, sa
silhouette mince enveloppée d’une écharpe tricolore et son béret noir vissé sur
la tête. Il approcha discrètement Alexia, Valentina et Sarah.
« Ce que je vais vous montrer... vous ne l’avez pas vu.
Compris ? »
Il les mena dans une arrière-salle, à l’écart.
Là, une toile recouverte fut dévoilée : une représentation stylisée
d’un homme tenant trois perles noires, chacune marquée d’une Fleur de
Lys. Au centre, un personnage en manteau masqué - Swann.
« C’était la dernière représentation publique du Fugitif,
dit OKKO. Swann l’a clôturée par son rituel. Et cette perle - il
la tenait comme un artefact sacré. Elle a disparu juste après. »
Alexia fixait la peinture. Le détail ne trompait
pas. Une des sphères contenait une série de chiffres presque
invisibles.
Sarah s'approcha, zooma avec son téléphone.
« Coordonnées GPS, souffla-t-elle. Une ancienne ferme à
la frontière du Jura. Abandonnée. »
OKKO sembla hésiter, puis ajouta :
« Il faut que vous sachiez... Swann ne joue pas.
Il croit en ce qu’il fait. Il parle de lignes de fuite, de réalité à plier… Il
a vu Alex Li. Il le suit. Peut-être même qu’il croit être son messager.
»
Alexia échangea un regard avec Sarah.
« On y va cette nuit. »
Et dans son oreillette, une voix retentit.
C’était Rémy Delorme.
« Commissaire. Mauvaise nouvelle. On a retrouvé un corps
dans une crypte désaffectée… Le même symbole. Et cette fois, il est gravé… dans
la chair. »
Chapitre 4 Le Rituel du
Silence
Les marches de la crypte grincèrent sous les pas
des enquêteurs. Une humidité froide collait aux murs de pierre. En tête, Alexia
tenait sa lampe torche levée, suivie de Sarah Da Silva, Rémy
Delorme et, exceptionnellement, Elisa Giacometti, convoquée pour l’analyse
des symboles.
Le corps était là, étendu sur un autel de fortune.
Un homme d’une trentaine d’années, les bras étendus, les yeux ouverts.
Sur sa poitrine, gravée profondément, la même Fleur de Lys. Mais
ici, elle était encerclée de trois autres symboles inconnus.
Elisa s’approcha, les yeux brillants d’un mélange
de fascination et de trouble.
« Ce n’est pas juste une signature… c’est un rituel,
souffla-t-elle. Une invocation. Ou peut-être... une fermeture. Ce cercle
signifie « scellement ». On a voulu enfermer quelque chose. »
Alexia fronça les sourcils.
« Ou quelqu’un. »
Rémy, accroupi près du corps, désignait une inscription
gravée sur le mur en lettres gothiques anciennes.
« Qui voit par les ombres, entend les vérités qu’on tait.
»
« Ce n’est pas une simple mise en scène, ajouta Elisa.
C’est une séquence. Il y a eu un premier acte, celui du musée. Ensuite la
pierre. Puis la crypte… On suit une logique rituelle. »
Sarah déglutit.
« Et le prochain acte ? »
Elisa se redressa lentement.
« S’il suit le schéma ésotérique… c’est l’« éveil ». Et
selon ces symboles, il doit avoir lieu dans un lieu lié à l’air, à la hauteur.
Une tour. Un sommet. »
Alexia comprit aussitôt.
« La Tour Bel-Air. Au cœur de Lausanne. »
Elle se retourna vers son équipe.
« On ne va pas attendre que le Fugitif termine sa mise en
scène. Cette fois, on va le précéder. »
Chapitre 5 Le Souffle de
la Hauteur
Minuit. Le sommet de la Tour Bel-Air était balayé par des
rafales, rendant la plateforme d’observation à la fois glaciale et
vertigineuse. Des unités discrètes de la police cantonale étaient en place,
coordonnées par Alexia Hoffer elle-même, l’œil fixé sur les schémas envoyés
plus tôt par Elisa.
Elisa, justement, restée en bas, suivait les lectures
d’énergie résiduelle à l’aide d’un capteur ésotérico-technique - un appareil de
sa propre conception, combinant technologie de détection thermique et éléments
alchimiques. À ses côtés, Valentina relayait les coordonnées vers Alexia.
« Il y a une concentration au nord-ouest de la
plateforme, dit Valentina dans la radio. Une anomalie vibratoire. »
Alexia, accompagnée de Sarah Da Silva et d’un agent
tactique, s’approcha lentement du coin désigné. Là, au sol, trois perles noires
parfaitement alignées, une quatrième placée à l’écart. Sur celle-ci : la Fleur
de Lys gravée, mais cette fois entourée d’un cercle brisé.
Et juste derrière… une silhouette se leva de l’ombre.
Swann.
Masqué, vêtu d’un manteau à motifs symboliques, il tenait
une cinquième sphère dans sa main, l’air calme, presque cérémonial.
« Commissaire Hoffer. Vous êtes venue… au bon moment. »
« Lâchez cette sphère, Swann, et mettez vos mains en
évidence, ordonna Alexia. »
Il sourit. Tristement.
« Vous ne comprenez pas. Je suis le médium. Le message
est en vous. C’est vous qu’il a choisie.»
Un mouvement brusque. Swann jeta la perle vers les pieds
d’Alexia. Elle explosa… non pas en feu, mais en une brume noire, dense,
odorante. Sarah cria. L’agent tactique se rua sur Swann, le plaquant au sol.
Quand la fumée se dissipa, Alexia tenait quelque chose dans
la main. Une carte. Vieille, en parchemin, dessinée à la main.
Un cercle… avec huit points reliés. Sept étaient déjà
cochés.
Et sous le dernier point non marqué, un mot manuscrit :
" Hoffer ".
Alexia ne dit rien. Mais au fond d’elle, une conviction
naissait.
Elle n’était pas seulement l’enquêtrice.
Elle était la cible.
Chapitre 6 Les Maillons
Cachés
Le lendemain, à l’aube, un silence lourd planait sur le
bureau d’Alexia Hoffer. La carte était étalée sur son bureau, scannée, analysée
par Elisa, et comparée par Valentina à d’anciens rituels symboliques.
Mais c’est un autre nom qui fit irruption dans l’affaire :
Alex Li.
« Commissaire, dit Rémy Delorme en entrant, j’ai reçu une
transmission étrange cette nuit. Un message chiffré, acheminé via un canal
hors-réseau. Il porte la signature d’un seul individu connu pour utiliser ce
protocole… »
Alexia leva les yeux.
« Alex Li. »
« Non. Une autre. Une ombre numérique. Elle a signé… Dodo
Dark. »
Rémy déposa un dossier sur la table. Clara Valois, alias
Dodo Dark. Hackeuse éthique, protégée par des couches de cryptage aussi
épaisses qu’un bunker. Alexia la connaissait déjà. Était-il possible que la
hackeuse éthique de l’équipe sache quelque chose qui échappait à la
Commissaire?
Mais cette fois, c’est elle qui appelait.
Le message était clair :
« Le symbole n’est qu’un déclencheur. Il active des
fragments de mémoire dans des cerveaux spécifiques. Des cibles. Des sujets.
Hoffer est une clé. »
Alexia se leva, glacée.
« Rémy. On doit voir Alex Li. Maintenant. »
« Bonne chance, répliqua Delorme. Depuis sa dernière
apparition au Café Philo, il a disparu des radars. Mais… »
Il tendit un second document.
« Le Capitaine Victor Huxley aurait été en contact avec
lui, officieusement. Ils partagent… des idées similaires sur l'effondrement du
système. »
Une heure plus tard, Alexia entrait dans le bureau de
Huxley. Il l’attendait, debout devant une carte murale recouverte de post-it et
de flèches.
« Vous ne cherchez pas un tueur, Alexia, dit-il d’un ton
calme. Vous cherchez un levier. »
« Expliquez-vous. »
Il posa une main sur la carte, pointant le huitième point.
Il était au centre de tout. Et ce centre… c’était la mémoire d’Alexia.
« Alex Li n’a jamais voulu fuir. Il vous attire. Il veut
que vous vous souveniez. »
Alexia recula légèrement.
« Me souvenir de quoi ? »
Victor la regarda, grave.
« De qui vous étiez… avant d’être Commissaire. »
Chapitre 7 Réminiscence
Un soir pluvieux, Alexia s’enferma dans son appartement.
Elle posa la carte sur sa table, entourée de livres d’archéologie, de carnets
de ses années universitaires, et d’objets oubliés depuis longtemps. L’un d’eux
attira son regard : une vieille photographie. Elle, plus jeune, au cœur d’un
site de fouilles près de Delphes. À ses côtés, un homme en blouse blanche.
Alex Li.
Elle s’en souvenait à peine. Mais ce visage… ce regard. Le
même que dans les fichiers récents. Il avait été là. Dès le début.
Elle mit le fichier audio transmis par Dodo Dark dans son
lecteur. Une voix synthétique, modifiée, s’éleva :
« Tu as
ouvert sept portes. La huitième est en toi. La stèle de l’oubli attend son nom.
»
Elle ferma les yeux.
Un souvenir refit surface. Un accident. Une galerie
effondrée. Et une stèle, au fond d’un puits oublié, marquée par une Fleur de
Lys et… une série de chiffres. Les mêmes que sur la carte. Ce n’était pas un
hasard.
Le téléphone sonna. Elisa Giacometti, excitée, sa voix
vibrante :
« Alexia ! J’ai recoupé l’analyse du parchemin avec les
glyphes ésotériques antiques. Ce n’est pas un rituel d’invocation, c’est un
protocole de récupération de mémoire fragmentée. Et tu es le déclencheur
central. »
« Alex Li savait quelque chose sur moi, murmura Alexia.
Quelque chose que je ne savais même pas moi-même. »
Sarah Da Silva, qui venait d’arriver, posa un objet sur la
table : un ancien carnet retrouvé à l’Université de Lausanne. Signé de la main
d’Alexia. À l’intérieur, une note griffonnée à la hâte:
« Si je m’oublie un jour, que le loup me guide. »
Elle leva les yeux. Tout s’éclairait.
Le loup tatoué. La stèle. La mémoire effacée.
Et Alex Li, qui tirait les ficelles.
Alexia se redressa.
« Il est temps de retourner là où tout a commencé. »
« Delphes ? demanda Sarah. »
« Non. Le musée souterrain. Sous l’Université. C’est là
qu’est cachée la stèle. »
Chapitre 8 La Stèle de
l’Oubli
La nuit tombait sur l’Université de Lausanne. L’accès aux
sous-sols, officiellement condamné depuis des travaux de sécurité, avait été
rouvert pour Alexia, Sarah et Elisa, grâce à l’autorisation spéciale du
recteur… et un peu d’ingéniosité de Dodo Dark, qui assurait une surveillance
numérique de leur avancée.
Les couloirs humides menaient vers une ancienne salle
d’archives transformée en annexe muséale. Là, au centre d’un enclos oublié, se
dressait une stèle de basalte, d’environ deux mètres, recouverte de mousses et
de symboles à peine visibles.
Alexia s’en approcha.
Son cœur s’accéléra. La Fleur de Lys. Le glyphe circulaire.
Et tout en bas… une inscription gravée à la main.
« Ce que
tu as voulu oublier. Ce que tu dois redevenir. »
Elisa, lampe à la main, analysa les gravures.
« Ce n’est pas un message. C’est une clef. Un mécanisme
d’activation mnésique. Probablement catalysé par une empreinte biométrique… la
tienne. »
Alexia posa sa paume sur la pierre. Un déclic. Une lumière
faible s’activa dans le socle. Puis… des projections holographiques. Des
images. Des souvenirs.
Une salle. Un groupe d’étudiants. Un projet expérimental
d’archéologie cognitive. À l’origine du collectif. À l’origine… du Fugitif.
Et Alex Li, à nouveau, au centre.
« Ce
n’est pas un jeu. C’est une reconstruction. Tu as voulu enterrer ce que tu
avais vu. Mais tu as laissé une partie de toi ici. »
Alexia chancela.
Sarah la retint.
« Tu étais là, dit-elle. Depuis le commencement. »
« Non, répondit Alexia, la voix cassée. J’étais la
première Fugitive. »
Un silence lourd s’installa.
Elisa, stupéfaite, murmura :
« C’est toi qui as lancé la première ligne de fuite.
Celle que Li a ensuite reproduite… et amplifiée.»
Les souvenirs revenaient. Alexia, jeune chercheuse, avait
découvert une faille dans la mémoire collective. Une méthode pour extraire et
modeler des souvenirs enfouis. Mais les implications étaient trop dangereuses.
Elle avait tout effacé. Elle s’était enfuie… dans la police.
Et maintenant, le passé revenait réclamer sa dette.
Chapitre 9 Le Visage du
Fugitif
Le lieu était choisi avec soin. Un amphithéâtre abandonné au
sommet du Signal de Sauvabelin, transformé en sanctuaire de verre et de bois
par les premiers membres du Collectif du Fugitif. À la lumière de la lune, les
symboles gravés sur les murs vibraient d’un écho ancien.
Alexia Hoffer entra seule.
Pas d’arme. Pas de renforts. Juste son carnet, son couteau
suisse, et le bracelet étoilé à son poignet.
Alex Li l’attendait.
Toujours vêtu sobrement, mais ses yeux - perçants, lucides,
presque douloureusement familiers - témoignaient d’années de secrets et de
calculs.
« Tu es revenue, dit-il doucement. »
« Tu m’as forcée. »
« Non. J’ai suivi ton chemin. J’ai juste redessiné les
contours de ta fuite. »
Un long silence s’installa.
« Tu savais que j’avais oublié. Que je m’étais...
effacée, murmura Alexia. »
« Tu t’étais sacrifiée. Pour protéger le monde d’une
vérité qu’il n’était pas prêt à entendre. Mais voilà… le monde a changé. »
Il sortit une perle noire, semblable à celles utilisées par
Swann et la posa entre eux.
« Tu peux la briser. Et tout s’arrête. Les lignes se
referment. La mémoire redevient silence. Ou… tu l’acceptes. Tu redeviens ce que
tu étais. »
« Une fugitive ? »
Il sourit.
« Une source. »
Alexia le regarda longuement.
Elle sortit son carnet. L’ouvrit à la dernière page. Et
écrivit trois mots :
« Je
choisis l’éveil. »
Puis elle tendit la main vers la perle.
Au moment où ses doigts la touchèrent, un éclair d’énergie
parcourut la pièce. Les symboles s’illuminèrent. Et dans un dernier regard
échangé avec Alex Li, elle comprit : il ne voulait pas son retour. Il voulait
qu’elle ouvre la voie pour d’autres.
Le monde vacilla.
Et Alexia Hoffer, Commissaire, chercheuse, fugitive, devint…
le point d’origine.
Chapitre 10 La Trame des
Origines
Six mois ont passé.
La Cathédrale de Lausanne a retrouvé son silence, mais dans
les souterrains de la ville, un nouveau murmure circule : celui de ceux qui
savent. Ceux qui ont vu au-delà des murs, au-delà de l’oubli.
Alexia Hoffer n’a plus remis son uniforme.
Son bureau est resté intact, verrouillé, comme figé dans le
temps. Le dernier rapport qu’elle a transmis à la direction de la Police
Cantonale portait un titre énigmatique :
« Mémoire et Justice: vers une conscience réticulaire ».
Nul ne sait exactement où elle est.
Mais certains prétendent l’avoir vue dans les ruines d’un
monastère aux confins du Tessin, gravant des symboles anciens dans la pierre.
D’autres disent qu’elle voyage avec OKKO, dans une caravane d’artistes,
réveillant les lignes de fuite dans les villes endormies.
Le Collectif du Fugitif s’est fragmenté. Ou peut-être…
s’est-il multiplié. Désormais, il n’a plus de centre. Juste des points de
contact, éparpillés, porteurs d’une idée :
« La
mémoire est une révolte. »
Sarah Da Silva a pris la tête de la division Enquêtes
Complexes, avec Elisa Giacometti toujours à ses côtés, l’exubérance gothique en
bandoulière. Ensemble, elles traquent les fragments résiduels de cette guerre
invisible entre vérité et pouvoir.
Rémy Delorme, lui, reste là où il a toujours été : dans
l’ombre. Veillant. Un chien de garde du réel.
François Martin (Zax) avait quitté la Police depuis
plusieurs mois pour se consacrer pleinement à ses activités de Gardien du
Temps.
Quant à Alex Li, on dit qu’il a disparu dans une
bibliothèque souterraine, continuant à écrire l’Histoire… non pas telle qu’elle
fut, mais telle qu’elle aurait pu être.
Et dans un vieux carnet, caché quelque part, une page
gribouillée par Alexia attend son lecteur:
« La
vérité ne s’écrit pas. Elle s’incarne. Si tu lis ces lignes, c’est que tu es
prêt. Prêt à fuir. Ou à rester. Le choix est toujours le premier acte. »
Et soudain, le monde sembla s’effondrer autour d’Alexia…
Elle ouvrit les yeux. Autour d’elle, elle vit sa table de nuit avec son
téléphone et se dit que ce n’était qu’un rêve, se leva et alla à la douche.
FIN














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